Une plongée originale sur le sable.

A la découverte des habitants du sable.


Rédigé le Vendredi 9 Octobre 2020 à 15:19 | Lu 2880 commentaire(s)

Le plongeur lambda n’aime pas le sable. C’est le récif qui l’attire parce que c’est là qu’il y a des choses à voir ! C’est incontestable, mais il ne faut pas pour autant se laisser berner par l’aspect désolé de ce désert de sable car on y découvre une biocénose intéressante.


La limace Queue d'Hirondelle, un redoutable prédateur.

Limace Queue d'Hirondelle
Sur le sable des végétaux se développent comme les algues mais également des plantes à fleurs comme l’Herbe à Lamentin, unique dans son genre ; elle possède des feuilles cylindriques.
On regardant de plus près vous aurez peut-être la chance d’observer une petite limace de 1 à 4 cm de long, de forme allongée. Elle possède une queue bifide ressemblant à une queue d’hirondelle, ce qui lui vaut son nom de Limace Queue d’Hirondelle,  (Chelidonura hirundinina) pour les puristes.
Cette limace n’est pas végétarienne, c’est un redoutable prédateur qui se nourrit de vers plats.

La Méduse Cassiopée vit à l'envers.

Méduse Cassiopée, ombrelle tournée vers le fond.
Plus loin, une méduse posée à l’envers sur le fond de sable agite ces tentacules. Est-elle en train de mourir ?
C’est une Méduse Cassiopée (Cassiopea frondosa), ombrelle posée sur le fond elle est en train de se nourrir. Les pulsions de son ombrelle créent un mouvement d’eau qui lui permet d’attraper du zooplancton.

Des crevette et Poissons Apogons se dissimulent sous une méduse Cassiopée.
L’autre raison de cette position insolite c’est qu’elle entretient une relation symbiotique étroite avec des algues (zooxanthelles) qui lui fournissent de la matière organique dont elle se nourrit. Ces zooxanthelles, qui ont donc besoin de lumière, sont logées dans les tissus de la surface ventrale et c’est pourquoi la méduse se présente retournée.

Elle abrite souvent des poissons Apogons et également des crevettes qui y trouvent un abri et une protection.
La méduse Cassiopée, comme tous les cnidaires, possède des organes urticants, ses hôtes trouvent ainsi une protection.
 

L'Olive Réticulée vit dans le sable.

Une Olive Réticulée surprise hors du sable.
On peut apercevoir parfois un long sillon sur le sable. En s’approchant on distingue une forme qui se déplace sous le sable. C’est l’Olive Réticulée (Oliva reticularis), un gastropode munit d’une coquille joliment décorée.
Elle se nourrit exclusivement de cadavres.

La famille des Strombes.

Un Strombe Laiteux en train de pondre.
Le sable est le domaine de prédilection de certains mollusques de la famille des Strombes. Le plus connu étant le Lambi (Strombus gigas). Mais on trouve également de nombreuses autres espèces : Strombe Laiteux (Strombus costatus), Strombe Aile de Faucon (Strombus raninus), Strombe Combattant (Strombus alatus), Strombe Coq (Strombus gallus).

Les Strombes Combattant se rassemble par centaines pour se reproduire.
Ils sont là pour se nourrir d’algues et de phanérogames ainsi que de détritus organiques. Mais également pour ce reproduire en se rassemblant par centaine. La ponte est un long cordon qui contient les œufs microscopiques en forme de pelote de laine, la ponte peut contenir environ 400 000 œufs.
En plongée à Port Louis sur le sable on peut y rencontrer de nombreux poissons :
Des raies Pastenagues souvent enfouies dans le sable en train de se reposer. 
Des Rasons, un étrange poisson qui se précipite tête la première pour disparaitre dans le sable.
Et des poissons encore plus étranges les uns que les autres ...

Le Rouget Volant.

Un Rouget Volant toutes ailes déployées.
On le rencontre sur les fonds sableux à proximité des herbiers en marchant sur le fonds à l’aide de ses nageoires pelviennes. C’est le Rouget ou Grondin volant (Dactylopterus volitans). Dérangé par le plongeur il déploie  ses énormes « ailes » teintées de bleu vif et s’enfuit.

Drôle de bête ! Le Trigle strié.

Le Trigle Strié marche sur les 3 rayons de ses nageoires pectorales.
Un autre marcheur le Trigle Strié (Prionotus aphryas). Il marche sur les 3 premiers rayons de ses nageoires pectorales indépendants et mobiles. Il les utilise aussi comme des mains pour retourner les sédiments coralliens. Mauvais nageur, il rechigne à nager et préfère se fondre par mimétisme dans l’environnement. Dérangé, il déploie ses nageoires pectorales et s’enfuit en grognant.

Le Diodon à Antenne.

Le Diodon à Antennes est pourvu d'épines en forme d'antennes sur la tête.
Il vit sur les zones sableuses à proximité des herbiers et se déplaçant lentement. Il se confond avec son environnement par mimétisme. C’est le Diodon à Antennes (Chilomycterus antennatus). Son corps est recouvert de courtes épines dressées en permanence. Sur la tête il porte des épines plus souples et plus allongées comme des antennes.

L'Antennaire Strié.

L'Antennaire Strié possède un leurre sur la tête en forme de boomerang.
Champion incontesté du mimétisme, son corps est recouvert de filaments translucides ressemblant à s’y méprendre aux algues environnantes. C’est l’Antennaire Strié (Antennarius striatus). Il possède au-dessus de la tête un long filament terminé par un leurre en forme de boomerang qu’il utilise comme une ligne pour attirer ses proies.

De plus en plus étrange ! Poisson Chauve-souris.

Un couple de Poisson Chauve Souris indifférents à la présence des plongeurs.
Là, on touche le summum de l’étrangeté !
Le poisson Chauve-souris (Ogcocephalus nasutus), il possède une tête volumineuse prolongée par une longue corne frontale,  une bouche exprimant la tristesse et il déplace à « quatre pattes » en s’appuyant sur ses nageoires pectorales largement développées, pourvues d’articulations en forme de coudes, et les pelviennes qui lui servent de patins.
Il est capable d’effectuer, assez lourdement, de courts déplacements en nageant à quelques centimètres au-dessus du sable.

L'art du camouflage.

Carrelet Ocellé parfaitement invisible sur le sable.
Et puis, il y a tout ceux qu'on ne voit pas à cause de leur mimétisme ! Le Carrelet Ocellé (Bothus ocellatus) fait parti de ceux-là. C’est un habitué des zones sableuses. Immobile sur le fond, se confondant parfaitement avec son environnement, vous pourrez l’approcher de près car il compte sur son camouflage.
Justement parlons-en du camouflage.
Le camouflage c’est l’art de passer inaperçu. Dans le milieu marin nombre d’animaux utilisent le camouflage, pour se protéger mais également pour surprendre une proie et la dévorer.
Avez-vous une idée du nombre d’animaux que vous ne voyez pas lors de vos plongées d’explorations ?
Dans le Grand Cul de Sac Marin du Parc National de Guadeloupe se dissimulent de très nombreuses espèces de poissons et d’invertébrés. La raison, échapper aux prédateurs ou pour surprendre leurs proies.
Il existe de nombreuses techniques de camouflage, la plus courante consistant à utiliser les couleurs et les formes de l’environnement immédiat.
Le Poisson Trompette (Aulostomus maculatus) utilise son corps allongé pour se fondre dans l’environnement d’une Eponge Corde. Immobile, tête en bas il chasse à l’affût ses proies.
 

Bourse Naine et Cigale de Mer.

La Bourse Naine et la Cigale de mer utilisent les couleurs de l'environnement pour passer inaperçu.
Il faut savoir que ce petit poisson la Bourse Naine (Monacanthus tuckeri) existe pour la déceler dans les ramifications de la Gorgone parfaitement imitée par les couleurs qui ornent ses flancs.
La Cigale de Mer (Parribacus antarcticus) possède une carapace basse et aplatie : sa texture pavée est rugueuse lui permet de se fondre sur le plafond de la grotte  ou elle a trouvé refuge.
Cette faculté qu’on certains animaux de prendre les couleurs ou la forme des objets qui les entourent, capacité très répandue chez les poissons et dans la vie marine en générale, s’appelle le mimétisme.

Poisson Vingt-quatre-heures

La Rascasse est dissimulée derrière la Gorgone la queue à gauche et la tête à droite (on aperçoit l’œil).
Coloration bigarrée de toutes sortes de brun et de rouge, nombreux appendices cutanés, la Rascasse tachetée ou Poisson-Vingt-Quatre-Heures (Scorpaena plumieri) est parfaitement invisible dans l'attente d'une proie insouciante du danger qui sera capturée d’un mouvement rapide associé à une aspiration d’eau.
Les rayons épineux de la nageoire dorsale du Poisson-Vingt-Quatre-Heures présentent un danger pour le plongeur  s’il vient à poser la main dessus. Ces épines creuses sont reliées à une poche à venin, la piqûre très douloureuse provoque un malaise. Une raison de plus, pour le plongeur, de respecter l’environnement en maitrisant sa flottabilité.

Le Poisson Crapaud.

Le Poisson Antennaire adapte sa coloration en fonction de l'environnement..
Un autre spécialiste du camouflage, le Poisson Crapaud  également appelé Antennaire (Antennarius multiocelatus) est un poisson bizarre. Il possède une peau rugueuse sans écaille qui adapte sa coloration en fonction de l’environnement.
Sa bouche très large lui donne un aspect monstrueux, au sommet de la tête une sorte d’antenne terminée par un leurre lui sert de canne à pêche.
Pour terminer le tout, ses nageoires pectorales ressemblent à des pattes que le Poisson Crapaud utilise pour se déplacer sur le fond ou s’agripper.
Il chasse à l’affût dissimulé dans son environnement agitant son leurre. Le poisson qui s’aventurera au voisinage du leurre disparaitra instantanément dans son énorme gueule.
Le Poisson Crapaud ou Antennaire, un habitué de nos sites à baptême.

Plus subtils, certains animaux vont utiliser des objets voir d’autres animaux pour recouvrir leur corps.

Sous l'éponge, on distingue les pattes du Crabe Dromi.
C'est le cas du Crabe Dromi (Dromia vulgaris), qui va utiliser une éponge pour se rendre invisible. Il va consciencieusement découper un morceau d'éponge qu'il va adapter à la taille de sa carapace. Ensuite il saisit l’éponge à l’aide de sa dernière paire de pattes orientées vers l'avant pour la maintenir en place.
La technique de camouflage rend la dromie assez mimétique et elle s'en trouve difficilement observable lorsqu'elle reste statique.
Le Crabe Dromi établit une véritable association symbiotique avec l’éponge, il va profiter du camouflage du spongiaire ainsi que de sa protection olfactive.
Ce dernier bénéficie de la mobilité du crabe qui lui confère ainsi une diversité alimentaire plus importante et une meilleure dispersion de ses gamètes.

L’Oursin des Sables à Rosace.

Un Oursin des Sables à Rosace utilise des débris coralliens pour se dissimuler.
L’Oursin des Sables à Rosace (Clypeaster rosaceus) est un oursin irrégulier aplati et allongé. Il est recouvert d'un dense tapis de fins piquants ce qui lui permet de s’enfouir dans le sable.
On le rencontre parfois dans les débris coralliens trop dur pour qu’il puisse s’y enfouir.
L’Oursin des Sables à Rosace va alors utiliser les matériaux alentour en l'occurrence des débris coralliens qu’il va maintenir sur son dos en utilisant ses pieds ambulacraires ou podias terminés par une ventouse.
Il échappe ainsi à la vue de ses prédateurs en l’occurrence les balistes.

L'Araignée à Rostre.

Pour voir l'Araignée à Rostre, il faut la sortir de son habitat.
L'Araignée à Rostre (Podochela sp.) est un petit crustacé de 2 à 6 cm d’envergure qui vit en général dissimulé dans les gorgones couvertes d’algues et d'hydraires, où elle se nourrit de plancton.
Sa petite taille la rend vulnérable aussi pour ne pas se faire manger elle a choisi de se rendre invisible.
Pour cela, l'Araignée à Rostre va implanter des hydraires ou d’autres organismes sur sa carapace et sur ses pattes.
Seul un plongeur averti saura la dénicher !

Le must en matière de camouflage.

Un Poulpe dissimulé sur un rocher, le mimétisme est parfait.
Mais les champions de tous sont les Poulpes.
Ce sont des mollusques très évolués, leurs yeux très performants et leurs longs bras ornés de puissantes ventouses en font des prédateurs redoutables.
Leur habileté à changer rapidement de couleur et s’adapter au milieu qui les entoure est légendaire.
Le changement de couleur du tégument est dû à l’action d’organes spécialisés appelés chromatophores, qui couvrent tout le corps du Poulpe.

Le Poulpe, champion !

Ces cellules musculaires se contractent ou se décontractent, ainsi les chromatophores vont se dilater ou rétrécir, ce qui va permettre le changement de couleur.
Ces quelques exemples montrent à quel point un animal camouflé est difficile à repérer. Même l’aspect désolé d’un désert de sable  cache une multitude d’organismes invisibles pour le plongeur lambda.
Seul un œil exercé et une bonne connaissance du milieu permettra de découvrir ces petites bêtes qui se cachent sous votre nez.

                                      Les avez-vous déjà vus ?

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